L’art de la traduction

Affiché 4 novembre 2020 Agence Rinaldi dans Textes d'experts

En six questions, Charlène, notre traductrice-réviseure, nous éclaire sur ce qu’est la traduction, ainsi que son importance dans le monde publicitaire.

Qu’est-ce que la traduction ?

Je pense que je n’apprendrai rien à personne en expliquant qu’il s’agit de prendre un contenu rédigé dans une langue (la langue de départ), et de le réécrire dans une autre (la langue cible). Par contre, je crois qu’il est important de préciser que la traduction ne se résume pas à prendre un mot et à le remplacer par son équivalent dans l’autre langue. Ce qu’on traduit, c’est le sens, pas les mots.

Comment qualifierais-tu la traduction ?

Essentielle, passionnante et… invisible, du moins en principe, car une traduction ne devrait jamais « sonner » comme une traduction. Une bonne traduction devrait toujours laisser au lecteur l’impression de lire la version originale du texte.

Comment devient-on traducteur ?

On peut passer par plusieurs chemins ! Si beaucoup de traducteurs détiennent un baccalauréat dans cette discipline, bon nombre d’autres se tournent vers cette dernière dans le cadre d’une réorientation de carrière, le plus souvent en entreprenant un ou deux certificats spécialisés en la matière.

Mais d’abord et avant tout, il faut aimer les langues, et maîtriser la langue d’arrivée à fond. De plus, on croit souvent à tort que toute personne bilingue peut s’improviser traducteur, ce qui est loin d’être le cas. Après tout, bien parler une langue ne signifie pas nécessairement qu’on en saisit toutes les nuances, qu’on en connaît tous les pièges, et qu’on sait bien la manier à l’écrit. Tout ceci s’apprend, bien sûr, mais cet apprentissage exige souvent une bonne dose d’humilité, car on doit souvent apprendre à remettre en question certaines de nos habitudes linguistiques.

Quelle est l’importance de la traduction en publicité ?

Elle est cruciale, évidemment, surtout dans le contexte unique que présente le Québec. Les Québécois d’expression francophone souhaitent non seulement qu’on s’adresse à eux dans leur langue, mais ils veulent se sentir respectés et appréciés. On ne peut les courtiser avec des messages « traduits » à la va-vite sur des logiciels de traduction comme celui de Google. Bien des entreprises ont pensé pouvoir tourner les coins ronds de cette façon et s’en sont mordu les doigts devant le tollé causé par leur méconnaissance du marché.

Les entreprises nationales et internationales qui souhaitent vendre leurs produits et services au public d’ici doivent le faire « en bon français », si vous me permettez l’expression, et miser sur des traductions professionnelles de qualité. Les mauvaises traductions sont au mieux ridiculisées (voir la chronique « Hein? » sur le site de Protégez-vous, un excellent moyen de se dilater la rate), au pire, vilipendées, lorsque le public voit en elles un certain mépris envers la langue officielle de la province.

Quels sont les plus grands défis reliés à la traduction dans le domaine de la publicité ?

Lorsque, dans sa langue de départ, la publicité se construit autour d’un jeu de mot ou d’une blague intraduisible. Il faut alors nécessairement aller plus loin que la simple traduction. On pourra alors ici parler d’adaptation ou de transcréation. Ce n’est pas toujours facile, surtout si les visuels de la publicité sont figés et qu’on doit s’y plier. Cela nous pousse parfois à faire bien des courbettes pour trouver une adaptation qui fonctionnera et qui sera tout aussi accrocheuse que la version originale. Mais comme défi, c’est on ne peut plus stimulant !

Il y aussi toute la question des limites de caractères imposées par certaines plateformes en ligne et sur les médias sociaux. Encore une fois, cela peut pousser le traducteur à rivaliser de créativité pour transmettre clairement un message lorsqu’il n’a pas d’autre choix que de couper à quelque part pour respecter la limite imposée.

Enfin, qu’est-ce qui distingue la traduction publicitaire des autres types de traduction ?

 Le côté créatif de la chose, sans aucun doute. La traduction de documents juridiques ou médicaux, par exemple, présente des défis différents et demande un champ de connaissances bien précis. La traduction publicitaire, elle, exige souvent qu’on sorte du cadre habituel pour que le message reste percutant et mémorable, ce qui n’est pas du tout le cas quand on traduit pour des domaines où le diable est dans les détails…

En traduction publicitaire, on peut davantage s’amuser et jouer avec toute la richesse et la malléabilité de la langue !

 

Charlène Côté | traductrice-réviseure